Des silhouettes s’égrènent comme une phrase musicale dont seule une note varierait. Popeline, twill, denim, intercalaires de noirs et de blancs argileux et poudrés comme des blouses de peintre. Un trench bitume en coton laqué, vibrant, crépitant, col ouvert, étalant une doublure d’un blanc de cierge.
Contraste entre le cuir noir presque laqué d’un bomber assoupli, aux épaules relâchées, tombantes, et le blanc crayeux, sourd et mat, d’un pantalon de denim à l’arc des jambes légèrement accentué, campant l’allure.
Un costume léger aux épaules longues, au porté souple, élégant dans sa légère fatigue. Capuche de maille rabattue en tour de cou, sac- poche comme un petit tablier, gourde en réticule de cuir. Un faux monochrome de noir résolu, têtu presque, d’encre, de feutre, de fusain.
Transformative, en feuilles successives de coton lin, de denim, de Nylon et de soie, ces silhouettes ont bu la teinture selon la densité et la nature de leur fibre. Ce ton, mauve/vert est fait d’herbes et de pétales fanés, d’hortensia et de terre sèche. Les poches sont profondes, les proportions étirées. Le col s’enroule, les revers resserrent et protègent, puis tout se transforme et s’affale lorsque le vêtement s’ouvre, révèle sa dissymétrie, au déboutonnage, dans une élégance relâchée.
Trousse agrandie portée par l’anse, poche de manteau devenue sac, besace à lacets épousant le corps comme un carquois, exosquelettes du vêtement, excroissances de réticules et de liens portés en accessoires comme ces ceintures concaténées et sangles de portage pour accrocher le vêtement. Sur les pans et les plans qui se superposent dans un continuum pour composer les silhouettes, confondant le sac et la veste, brouillant naturellement les usages pour mieux les faciliter.
Le lien lâche d’une ceinture de trench, portée à l’avant du vêtement, pince doucement le volume à deux pans d’une ample robe-surchemise aux proportions masculines et étirées. Les grandes poches tombantes à rabat sur la poitrine, le col et les poignets accentués donnent l’aisance et l’élégance du trop grand, de l’emprunt, du masculin détourné.
Comme une poupée en laine shetland feutrée, aux boutons trop grands, aux poches plaquées un peu trop longues, évoquant des détails militaires.
Un manteau-peignoir au volume ample, monté comme un duffle-coat, non doublé, coutures rabattues, noblement rudimentaire, porté sur une surchemise aux poches agrandies et basses, aux tons de feuilles tombées.
Un même ton de rouge baigne des silhouettes au port abaissé. Un plaid de coton quilté boutonne la taille, devient une sur-jupe. Un manteau couvre les épaules. Rouges intenses ou affadis par le soleil, cuits par le temps et les intempéries, ou noircis. C’est un même bain qui surteint ces popelines légères, ces toiles fortes, nylons et cotons matelassés, chaque matière gorgée selon son grammage et sa soif de couleur.
Une fausse robe de crêpe de soie rouge, une jupe et son haut à pan comme un drapé déboutonné.
Variations de denim teint en pièces et lavés aux teintes cigare, à l’effet mat, presque poudreux, contrastant avec un cuir lisse. Les équilibres sont asymétriques jusque dans un tablier sur-jupe à une seule bretelle.
Sur l'oreille pend un faux corail de perles rouges, qui se fige le long du cou. Emmêlement précieux, comme un trésor d’enfant, le recel fantastique d’un nid d’oiseau tressant cheveux et brins, fils emperlés.
Imprimé sur une veste, un pantalon et une chemise, un herbier de fleurs fines, tiges et graminées, contraste avec le blanc d’une soie rappelant un carnet à dessin. Aux oreilles, les touches ivoirines de clips et pendants. Sur la poitrine, un miroir se porte en amulette laquée, ronde et caressante comme une castagnette.
Dissymétrique, un tailleur de laine Shetland, au damier bleu et marron, électrisant, est fait d’une jupe et de sa veste croisée jusqu’à l’aisselle, comme une couverture trop large serrée contre soi.
Le boutonnage en asymétrie de la jupe plisse et vient marquer la hanche. Les manches chaudes et généreuses godent et remontent comme des gants. Ce carré de tweed est aussi une sur-jupe ouatinée, retournée à la taille, marquant les hanches de son revers mat. Le même damier en laine shetland pour l’homme : une veste moelleuse, épaisse, enveloppante, aux épaules longues. Les ceintures de cuir servent de sangles de portage pour accrocher un pardessus, un tricot, un quelque chose à soi.
Un bleu de ciel givré, singulier, pour une fausse robe de drap de laine, composé d’une jupe et d’un top presque taillé dans une épaisse chemise d’homme coupée aux poches pour en rapprocher la carrure.